mercredi 23 novembre 2016

Paris : l'hébergement d'urgence ne suffit pas

Près d'une centaine de demandeurs de logement se sont invités aujourd'hui à l'inauguration d'un nouveau centre d'hébergement d'urgence du SAMU Social , rue Titon , dans le 11ème arrondissement. Nous avons pu faire part de nos revendications à Christine Laconde, directrice générale du SAMU Social et également interpeller l'équipe de Mme Versini, adjointe aux Affaires Sociales de la Ville de Paris. 
Des centaines de personnes meurent chaque année dans la rue. Chaque place d'hébergement compte , lorsqu'il s'agit d'agir dans l'urgence absolue.

Mais à peine ouvert,  chaque  nouveau centre  est déjà occupé, voire saturé. Ceux qui y vivent ne sont pas près de sortir du circuit de l'hébergement d'urgence.

cette errance et cette précarité perpétuelle , qui sont le lot de centaines de milliers de Parisiens ne peuvent pas être tolérés au prétexte que «  ce serait toujours mieux que la rue ».

Aujourd'hui des familles entières continuent à croupir des années dans des hôtels de banlieue, alors que leurs enfants sont scolarisés à Paris. Les communes où elles vivent les rejettent administrativement, et leur refusent tout droit social, tout accès aux services publics municipaux et même la scolarisation. Que fait la Ville de Paris ?

Aujourd'hui, le délai d'attente pour un relogement s'allonge tellement que des personnes restent quatre ans dans des résidences sociales où l'hébergement était prévu pour un an. Un non-sens qui coûte cher à tout le monde : les personnes qui auraient besoin de ces structures n'y trouvent pas de place, le suivi social qui y est assuré ne sert plus à rien.

La saturation de l'hébergement d'urgence  découle du manque de logements sociaux adaptés aux revenus modestes crée un autre phénomène ; le non-recours. Quand le SAMU Social ne répond plus, sur la durée, beaucoup renoncent à appeler et survivent au jour le jour, d'hébergement précaire en hébergement précaire, chez des proches au mieux,  et au pire chez des marchands de sommeil qui font payer même une place de canapé ou une adresse administrative. Ces situations sont toujours temporaires et cela se termine toujours par une mise à la rue. Pourtant la cotation mise en place par la Ville de Paris minore la gravité de ces problèmes ou les nie : l'hébergement précaire «  à droite, à gauche » n'est pas considéré comme une situation de Sans Domicile Fixe alors que c'en est justement la définition. Qu'en pense Mme Versini ?

Mal-logés en butte à la stigmatisation et au rejet, nous savons mieux que personne que le respect de nos droits est désormais combattu de plus en plus fortement, au point que l'ouverture d'un simple centre d'hébergement suscite des attaques intolérables de la part d'une partie de la population et d'élus indignes. Mal-logés en lutte pour nos droits nous sommes les victimes de ces attaques que nous vivons au quotidien dans nos mobilisations.

Et c'est pour cette raison que la Ville de Paris ne peut nous opposer ces attaques comme une preuve qu'elle en ferait bien assez pour nous. Nous ne renoncerons à aucun de nos droits parce que certains voudraient nous priver de tout, et nous voir à la rue.

L'hébergement n'est pas suffisant,
tous les Parisiens ont le droit à un vrai logement.

mercredi 16 novembre 2016

Cotation de la demande de logement: l'arbitraire gravé dans le marbre à Paris

Ce 16 novembre, une centaine de mal-logés ont saisi  collectivement le médiateur de la Ville de Paris, après avoir constaté l'impossibilité d'obtenir des réponses des élus parisiens, notamment l'Adjoint au Logement, sur l'arbitraire gravé dans le marbre créé par la mise en place de la cotation des demandes de logement.

L'accès au logement social est un droit ouvert à tous les Parisiens, sous conditions de ressources. La pénurie de logements sociaux ne peut conduire à exclure de fait certaines catégories de demandeurs de logements. C'est pourtant ce qui se produit avec le système de la cotation, qui dans les faits crée une situation très différente de la précédente.

En effet, avant la cotation, n'importe quel demandeur de logement avait une possibilité de voir son droit au logement satisfait. Aujourd'hui dès lors qu'un nombre limité de critères a été fixé et imposé à chaque commission, une partie des mal-logés est tout bonnement exclue de la sélection.

C'est le cas par exemple des victimes d'indécence de leur logement, puisque ce critère n'a pas été retenu par les élus. Les demandeurs de logement souffrant de ce type de problèmes ne peuvent jamais les faire valoir auprès de la Ville.
De la même manière, la cotation définit arbitrairement la situation de sans domicile fixe : seuls les demandeurs domiciliés administrativement dans des associations agrées sont reconnues comme telles. Le site de la mairie le dit très clairement dans sa FAQ sur la cotation : « habiter à droite à gauche », ce n'est pas être sans domicile fixe. On ne saurait trouver contradiction plus absurde dans les termes, et plus injuste dans le réel, quand on connaît la saturation des dispositifs de domiciliation. 
Cerise sur le gâteau de l'injustice, les bailleurs sociaux de la Ville ont décidé d'ajouter d'autres critères à ceux de la cotation : par exemple, quelle que soit leur situation de mal-logement et leur cotation, les propriétaires occupants sont désormais exclus de tout relogement.

Evidemment, au vu du manque de logements vraiment sociaux disponibles, les demandeurs parisiens ont toujours subi un tri sélectif imposé par la pénurie. Et la première des inégalités est crée par une offrequi ne correspond pas à la demande des classes modestes de lacapitale.

Mais la cotation va encore plus loin dans l'inégalité, en déterminant arbitrairement des « priorités » globales qui valident concrètement le non-accès aux droits d'un grand nombre de mal-logés, dont la situation particulière n'est même plus examinée.

Le droit au logement n'est pas sur concours : les mal-logés n'ont pas à subir l'attaque supplémentaire à leur dignité crée par un système de « points », derrière lesquels se retranche désormais Ian Brossat. Chacun d'entre nous a les mêmes droits.

Dans l'impossibilité non seulement d'obtenir leur respect par les élus de la Ville, mais même d'engager un dialogue sur le sujet, nous venons donc demander au Médiateur de porter la parole des exclus de la cotation, et du droit au logement.

samedi 5 novembre 2016

Propriétaires occupants et mal-logés : la Ville de Paris refuse illégalement le relogement.

Depuis plusieurs années, la Ville de Paris bichonne les propriétaires bailleurs, ceux qui ont les moyens financiers d'acheter des logements et de les louer. 
Ceux-ci sont garantis d'obtenir des subventions dès lors qu'ils acceptent de louer pendant une durée très déterminée, un peu en dessous des prix du marché, comme dans le cas du dispositif Multiloc.
Ian Brossat envisage également de soutenir les propriétaires privés qui souhaiteraient réhabiliter des chambres de bonne insalubres pour les relouer. Et bien sûr, les gros investisseurs immobiliers qui possèdent des bureaux obsolètes  et souhaitent les transformer en logements , ont droit, eux aussi à toutes les attentions matérielles et juridiques de la mairie pour leur faciliter la tâche .

Mais il y a une autre réalité de la propriété à Paris, qui n'a rien d'un rêve doré, mais tout du cauchemar commun aux autres mal-logés : dans une période où les prix immobiliers étaient beaucoup moins élevés beaucoup d'ouvriers ont acquis des biens de faible valeur, des studios ou de minuscules deux-pièces dans des immeubles peu entretenus . Croyant réaliser un investissement pour l'avenir, ils ont été piégés par le marché de l'immobilier : lorsqu'ils ont fondé une famille, que celle-ci s'est agrandie, leur statut social et les prix de l'immobilier rendaient impossible la vente du bien pour acquérir quelque chose de plus grand, et l'accès au marché locatif privé leur est aussi fermé, au vu des prix des loyers. 

Beaucoup d'entre eux vivent aujourd'hui dans des logement en sur-occupation lourde, souffrent de problèmes d'insalubrité et doivent en plus acquitter des charges de co-propriété qui les étouffent financièrement. 

Sur le papier, dans la capitale, leur demande de logement social est reconnue. Beaucoup d'entre eux ont le label DALO et même dans le cadre de la cotation ultra-restrictive et injuste établie par la Ville, ils obtiennent des scores très élevés. 

Mais de manière arbitraire et illégale, les bailleurs sociaux contrôlés par la Ville de Paris ont décidé de bloquer toute attribution de logement à des propriétaires occupants, quelle que soit leur situation de mal-logement. 

Le cabinet de Ian Brossat a reconnu froidement cette politique devant notre collectif, à propos d'un dossier dont il reconnaissait lui-même le niveau de cotation extrêmement élevé. Selon l'adjoint au Logement, reloger un propriétaire occupant serait illégal. Si l'on comprend bien la loi DALO qui reconnaît le caractère prioritaire pour le relogement des situations de sur-occupation et d'insalubrité serait donc illégale. Les tribunaux administratifs qui valident les décisions des commissions DALO allant dans ce sens bafoueraient la loi . La cotation établie par la Ville de Paris , qui fait la même chose serait aussi dans l'illégalité. 

C'est évidemment ridicule et arbitraire. La loi est en effet très claire sur le sujet dont elle traite dans l'article  L441-2-2 du Code de la Construction et de l'Habitation, dont voici le texte:

" Tout rejet d'une demande d'attribution doit être notifié par écrit au demandeur, dans un document exposant le ou les motifs du refus d'attribution.
Le fait pour l'un des membres du ménage candidat à l'attribution d'un logement social d'être propriétaire d'un logement adapté à ses besoins et capacités peut constituer un motif de refus pour l'obtention de celui-ci."

La loi ne concerne donc nullement les propriétaires occupants victimes de mal-logement.
Ce sont donc bien les bailleurs sociaux parisiens, à commencer par Paris Habitat OPH et la RIVP qui se livrent à des pratiques objectivement discriminatoires en refusant systématiquement les relogements, notamment ceux proposés par la Préfecture sur des logements qui relèvent de leur contingent.

Ces pratiques maintiennent dans le mal-logement des Parisiens de très longue date pour la plupart, souvent retraités modestes qui sont privés d'accès à leur droit à un logement décent dans la ville où ils ont toujours vécu.

Doit-on accepter que le tapis rouge des subventions et des facilités administratives soit déroulé devant les investisseurs immobiliers tandis que les propriétaires les plus modestes de la capitale soient abandonnés ? 


mercredi 2 novembre 2016

19ème arrondissement:l'insalubrité partout, même dans les logements sociaux.



Plus de 70 mal-logés ont manifesté ce 2 novembre devant la mairie du 19ème arrondissement contre l'insalubrité qui gagne du terrain dans la capitale. 

Depuis quelques années, parce que des taudis effectivement infâmes ont été détruits dans les quartiers de l'Est parisien, l'idée selon laquelle le problème de l'insalubrité serait globalement résolu à Paris s'est imposée.

La réalité est bien différente, et les personnes concernées ont encore plus de mal à faire prendre en compte leur situation, parce qu'elle est désormais invisibilisée.
De plus, la politique de lutte contre l'insalubrité se résume souvent aujourd'hui à la prescription de travaux au coup par coup , travaux pour lesquels les propriétaires reçoivent beaucoup d'argent public, sans que cela résolve la situation des mal-logés, qu'on ne reloge pas.

A l'approche de l'hiver, beaucoup d'habitants s'apprêtent ainsi à vivre au milieu des fuites d'eau, dans des appartements aux murs couverts de moisissures, à l'installation électrique dangereuse et défaillante. A l'heure où l'on parle beaucoup de « précarité énergétique », il faut rappeler que les logements humides et mal isolés amènent également, pendant l'hiver à une surconsommation énergétique, à des factures d'électricité ou de gaz exorbitantes qui fragilisent encore un peu plus des ménages aux revenus modestes.

Pire, l'insalubrité n'est pas réservée aux logements du parc privé : dans le 19ème arrondissement notamment, certains logements sociaux sont également touchés, faute de réhabilitation lourde. Depuis quelques années, afin de pallier au manque de grands logements HLM à loyers réellement sociaux, Paris Habitat et d'autres bailleurs de la Ville ont « modulé » leurs appartements. En ajoutant une cloison, on a ainsi « transformé » des F3 en F4. Cette « transformation » , dans des appartements déjà dégradés a aggravé la situation : les « nouvelles pièces » ainsi crées n'ont pas le niveau d'aération nécessaire. Les problèmes d'insalubrité dans le logement social sont le plus souvent niés : comme il s'agit des bailleurs sociaux de la Ville de Paris, le Service Technique de l'Habitat, lui même dépendant de la Ville ne les reconnaît pas. Pour les commissions DALO , à partir du moment où les mal-logés sont locataires d'un logement social, les foyers sont exclus du dispositif.

L'insalubrité ne se résume pas aux situations les plus tragiques, celles où les immeubles finissent par brûler ou par s'effondrer. Les tragédies n'arrivent pas du jour au lendemain, par de tristes hasards : les désordres accumulés et non traités , l'abandon des locataires dans des logements indécents, le refus de les reloger, et des travaux légers qui ne changent rien finissent par créer des drames.

Nos élus doivent reconnaître les dangers graves auxquels sont confrontés une partie des habitants de leurs arrondissement, et la situation insupportable qu'ils vivent au quotidien, qui dégrade leur santé et celle de leurs enfants. L'aide financière aux propriétaires privés ne peut être l'unique réponse, les locataires du parc public comme du parc privé doivent aussi voir leurs droits respectés.