Notre collectif a manifesté aujourd'hui toute la matinée dans la mairie de Boulogne Billancourt (92 pour dénoncer le manque de logements sociaux, véritable raison de la crise de l'hébergement d'urgence.
Comme
tous les hivers, la question des personnes à la rue fait irruption
dans l’agenda politique. Mais les débats et les propositions ne
portent que sur le manque d’hébergements d’urgence. En ne
parlant pas de la question de l’accès au logement social, on
favorise toutes les polémiques honteuses et dégradantes : que
ce soit en accusant les migrants de prendre les places de dortoir ou
en s’en prenant aux SDF qui refusent des propositions de mise à
l’abri de quelques heures seulement et dans des conditions
épouvantables.
Mais
l’hébergement d’urgence ne serait plus saturé si toutes celles
et ceux qui attendent en vain un logement social en sortaient. Or,
depuis deux décennies, des communes , pourtant très riches, ne
respectent même pas la loi SRU. Celle-ci est pourtant un minimum,
pas suffisant mais parfaitement atteignable. Au lieu d’accuser les
victimes du mal-logement, le gouvernement ferait donc mieux de se
préoccuper de faire appliquer la loi.
Mal-logés,
nous somme donc venus manifester à Boulogne, deuxième ville plus
riche de France. Le dernier bilan SRU, sorti ce 18 décembre,
indique que la ville est de nouveau de celles qui n’ont même pas
respecté leurs engagements minimum pour arriver au quota légal.
En
2014, la ville ne comptait même pas 15 % de logements sociaux,
. En 2001 il y avait un peu plus de 5000 logements sociaux déjà
construits à Boulogne. En 13 ans, il s’en est fait seulement 3000,
dans une commune qui avait pourtant d’immense surfaces disponibles
et où les nouveaux bureaux et locaux d’activités ne cessent de
sortir de terre.
De
plus, à Boulogne Billancourt, certains logements sortent du parc
social : ce 11 décembre, Nexity, un des plus gros opérateurs
immobiliers privés a annoncé le « rebouclage » réussi
de logements en « usufruit locatif social » à Boulogne
et Issy. De quoi s’agit-il ? De logements comptés comme
logements sociaux pendant quelques années, mais qui appartenaient à
des propriétaires privés. Ceux-ci ont accepté d’en céder la
gestion à un bailleur social de manière temporaire, en échange
d’exonérations fiscales très importantes. A l’issue de la
convention, les propriétaires récupèrent leur bien qui a pris de
la valeur , payent beaucoup moins d’impôt sur la plus value en cas
de vente...et augmentent les loyers , charge au bailleur social de
reloger les locataires en place. L’opération est très coûteuse
pour les finances publiques, permet d’augmenter artificiellement le
parc social pendant quelques années, ce qui est bien utile pour ne
pas payer d’amendes au titre de la loi SRU. Mais ensuite, ces
logements reviennent dans le parc privé , aux prix du marché.
Boulogne
compte de nombreux mal-logés, notamment victimes de sur-occupation
et d’indécence des logements dans le parc privé ancien. C’est
aussi une ville d’entreprises et d’activité économiques où des
dizaines de milliers de salariés modestes viennent de toute l’Ile
de France pour travailler, sans pouvoir se loger à proximité. Elle
est au centre du Grand Paris, tout autant que la capitale : mais
sa politique de logement social montre à quel point la métropole
continue à se construire de manière terriblement inégalitaire.
Dans les communes qui respectent la loi SRU, au nom de la mixité
sociale, les élus refusent de construire plus de logements sociaux.
Dans celles qui ne la respectent pas, la situation évolue au
compte-gouttes depuis vingt ans : dans le même temps, par
contre, les loyers du privé ont tellement explosé que le parc est
devenu totalement inaccessible aux catégories populaires.