Le Ministre de la Cohésion des Territoires et la maire de Paris étaient
aujourd’hui en visite dans le 19ème arrondissement, un des
quartiers de la capitale très touchés par le mal-logement et
l’insalubrité, à l'occasion des Etats généraux de la Politique de la Ville. Nous sommes venus manifester contre la régression inacceptable des politiques de lutte contre le
saturnisme et l’intoxication au plomb.
Dans les années 90, les luttes des mal-logés ont mis en évidence
le scandale de l’empoisonnement au plomb dont étaient victimes les
mal-logés et leurs enfants, exposés aux peintures dégradées
présentes dans de très nombreux taudis. Les pouvoirs publics ont du
réagir, face à la prise de conscience du désastre sanitaire et
social. Mais aujourd’hui, les effets conjugués de
l’affaiblissement des services publics, des difficultés d’accès
aux droits , du non-respect du droit au logement réactivent le
danger.
Actuellement,
les pouvoirs publics n’ont d’obligation d’intervenir qu’ à
partir de la détection de présence de plomb supérieure à 50μg/L
de plomb
dans le sang d’un enfant. Mais toutes les données scientifiques
démontrent que l’intoxication au plomb peut générer des effets
terribles bien en deça de ce seuil, notamment sur le cerveau :
des retards mentaux apparaissent chez les victimes contaminées très
faiblement. De plus, on connaît très mal les effets à long terme
de l’intoxication au plomb.
Aujourd’hui,
le dépistage du plomb dans le sang est de moins en moins pratiqué
spontanément par les professionnels de santé, et de moins en moins
prescrit par les PMI. Le saturnisme apparaît comme une maladie du
passé. De nombreux immeubles insalubres ou indécents , ou des
logements dégradés isolés , même signalés aux autorités ne font
pas l’objet d’un diagnostic plomb. Et
les contaminations reprennent.
A
Paris , une des villes les plus riches du monde, des enfants sont
contaminés et exposés sur la durée, alors même que les taudis où
ils vivent sont connus de la Préfecture et du service technique de
l’habitat. Le recul des politiques de prévention est tel que
beaucoup de mal-logés directement concernés ne connaissent même
pas l’existence du risque plomb et le saturnisme. En
1995, 6300 enfants étaient dépistés
chaque année, ils ne sont que 2000 aujourd’hui.
La
persistance du saturnisme est un symptôme de la gravité de la
régression des politiques contre le mal-logement . Des
enfants sont encore exposés parce que leurs parents n’ont d’autre
choix que le maintien dans des taudis parce que le logement décent
est devenu inaccessible à beaucoup d’habitants des métropoles.
Le
projet de loi ELAN envisage de durcir les sanctions contre les
marchands de sommeil. La
loi DALO comme les critères de cotation de la Ville de Paris
reconnaissent l’insalubrité du logement comme un critère de
relogement. Et après ? Après les droits de papier se heurtent
au manque de logements sociaux, à leurs loyers trop chers, aux
difficultés d’accès aux droits , à une politique hypocrite qui
fait tout reposer sur l’action des mal-logés eux même, censés se
débrouiller pour trouver et saisir les services compétents dans le
grand dédale administratif qui sert de dispositif de lutte contre
l’insalubrité.
Ces
derniers mois, confrontés à des situations dignes du 19ème siècle
, notre collectif a du se mobiliser, notamment en occupant l'ARS, pour obtenir même le minimum, le
dépistage de situations à risques. C’est intolérable, mais nous
continuerons .
Face
au danger sanitaire du mal-logement, face au saturnisme, briser le
silence par la mobilisation , c’est la seule solution face à des
pouvoirs publics qui ne prennent pas la mesure du risque.